LES SOURCES D’EAU CHAUDE ET FONTAINES DE RENNES-LES-BAINS
- Par Nature Source Chaude
- Publié le
- Mis à jour le 17 novembre 2024
L’histoire de Rennes-les-Bains, seule station thermale encore en activité dans l’Aude, est très ancienne puisque ces eaux étaient déjà connues et exploitées par les Romains. De vieilles canalisations et un réseau d’acheminement des eaux fort développés ont été mis à jour, sans oublier les vestiges et objets découverts. Il y a 2000 ans ou plus, on vivait, on déambulait à Rennes-les-Bains (anciennement appelé Rhedae). Le lieu était déjà consacré aux soins du corps et au repos de l’esprit.
Au milieu du XIXe siècle, il en fut de même avec un thermalisme français qui demeura très prospère. Pendant cette période, Rennes-les-Bains connut une forte fréquentation (5000 curistes/an), qui a baissé depuis ( 1000 curistes/an). Les sources utilisées par la station furent d’ailleurs exploitées avec une sérieuse attention au niveau du captage et de l’aménagement. Petit à petit, les sources actuelles remplacent les sources anciennes avec parfois quelques modifications dans la qualité intrinsèque des eaux.
Désormais, l’une d’elles, la source Bains Doux, n’est plus exploitée et son bain reste accessible gratuitement toute l’année.
Nous verrons aussi que le village recueille de véritables eaux minérales thérapeutiques, formidables attraits pour les buveurs d’eau d’antan.
AU SOMMAIRE :
Carte des sources chaudes et fontaines de Rennes-les-Bains et aux alentours
🗺️ À proximité des Thermes de Rennes-les-Bains, retrouvez sur la carte :
– la source des Eaux Chaudes d’Alet-les-Bains (ancienne station thermale d’Alet-les-Bains)
– la source de la Fontaine (ancienne station thermale de Campagne-les-Bains)
Les Bains Forts
Les eaux thermales des Bains Forts sont les plus chaudes de la station (parmi les 5 sources thermales) avec une température variable allant de 41 à 47 degrés. Elles ne sont exploitées qu’en période de cure thermale. La source Bains Forts, captée dans le sous-sol d’un hôtel (ancien therme) de couleur rose, est alors acheminée vers l’établissement thermal et la piscine thermale situées à moins de 200 mètres. Sa température élevée permet de réchauffer (extraction des calories et restitution aux sources moins chaudes) les sources thermales utilisées par la station.
Mais lorsque la ville demeure assoupie jusqu’aux environs d’avril (comme la plupart des stations thermales), ces eaux se perdent dans la rivière. Un escalier situé à l’arrière de cet hôtel (l’Hostellerie) mène par une petite galerie jusqu’au pied de celui-ci. On tombe alors sur l’ancien lavoir du village qui recueille en premier lieu ces eaux thermales avant qu’elles ne se déversent dans la rivière. Mais ce site, véritable bain public l’hiver, a été transformé plusieurs fois ces dernières années pour décourager le baigneur d’y venir. Les eaux thermales semblent maintenant se déverser directement dans la rivière sous la dalle en pierre.
Mon intention était de voir ce lavoir de plus près mais un portillon en fer, fermé à clef, m’empêche d’accéder à la galerie. Peut être que celui-ci ne reste ouvert que l’hiver.
Les Bains Doux
La vie des bains, à Rennes-les-Bains, est douce et simple. Elle semble appropriée aux tendances des personnes qui y habitent. Le lieu est paisible et les alentours offrent de nombreuses balades dans une nature riche. À l’entrée du village, le parc thermal du nom de « Jardins de la Reine » propose aussi un bel endroit pour marcher ou prendre le temps de se détendre. À l’extrémité du parc, là où mène le sentier, il y a quelques tables de pique-nique et un bassin d’eau chaude aménagé (provenant de la source Bains Doux) que l’on peut apercevoir de l’autre côté de la rivière.
Le départ pour accéder au bassin d’eau chaude s’effectue donc devant l’établissement thermal. Je jette d’abord un coup d’oeil sur la piscine thermale en contrebas avant d’emprunter un chemin tout tracé (traversant le parc Les Jardins de la Reine) jusqu’au bain naturel. L’approche dure 5 minutes et est tout à fait grandiose.
Des bains naturels
En m’approchant de la rivière, j’observe une présence importante de salmonidés de petite taille dans l’eau. Ces poissons d’eau douce ne semble pas être dérangé par l’eau de la rivière qui est salée (d’où son nom la Sals). La vie y est aussi très active dans l’eau à une autre échelle : microbienne. Des microbes capturent des sels minéraux nécessaires à leurs cellules en grignotant la roche. Mais comme la roche évolue lentement, les rochers qui me permettent de traverser à pied sec le cours d’eau, avec un peu d’adresse, ne disparaitront pas de sitôt.
Ces sels minéraux, composés essentiels à la vie des microbes le sont également pour nous, êtres humains, mais aussi pour nos propres microbes (microbiote). D’ailleurs, cette dissolution de la roche dans l’eau comme source des sels minéraux est encore plus intense lorsque l’eau est chaude.
Lorsque l’eau et la chaleur sont réunis, on croyait que cela suffisait à augmenter la vitesse des réactions chimiques et dissoudre les roches plus rapidement. Mais on sait aujourd’hui que ce sont surtout les microbes, par le biais de la chaleur, qui accélèrent leurs réactions cellulaires et donc leur action sur les roches!
Avant de parvenir à la surface du sol, la source Bains Doux a donc rencontré à travers son voyage souterrain une kyrielle de micro-organismes qu’on pourrait qualifier de « mineurs de pierre » (l’une de leurs nombreuses fonctions). Lorsque la source Bains Doux se retrouve ensuite dans le bassin aménagé, d’autres micro-organismes adaptées aux conditions du milieu s’épanouissent librement dans l’eau.
J’observe d’ailleurs sur le site une très grande quantité de plancton thermal (bactéries, algues…) tapissant le sol (pierres) du bassin sur toute sa longueur, ce qui le rend très glissant. La lumière arrive à profusion sur le lieu et les bactéries photosynthétiques n’ont alors aucun mal à se développer. Ce plancton thermal est important puisqu’il permet d’enrichir la composition de l’eau de tout un ensemble de molécules actives qui vont traverser la barrière cutanée et intervenir sur les tissus malades.
Les dépôts orangées qu’abandonne l’eau autour du bassin sont du fer, des oxydes complexes plus ou moins durcis. Des bactéries chimiolithotrophes utilisent ce fer, apporté par la source Bains Doux, pour produire de l’énergie qui leur sert à vivre tout en produisant des formes plus oxydées du fer. Ces taches orangées abritent là aussi une diversité microbienne considérable.
Enfin, lorsque cette belle chute d’eau thermale, sortant d’une étrange cavité, tombe directement sur la tête, elle offre au baigneur une véritable douche thérapeutique. Cette pratique n’est pas seulement utilisée pour des raisons d’hygiène corporelle, mais aussi pour soigner les maladies localisées à la tête ou pour accélérer la cicatrisation des lésions cutanées. La douche thermale, qui a l’avantage d’avoir un effet mécanique sur la peau, reste complémentaire au bain. Une fois debout, ce jet d’eau (pression naturelle) est à vous renverser et l’on peut se cramponner au mur ou à une barre métallique bien utile pour ne pas glisser.
Ces eaux qui se sont chargées des propriétés des lieux à travers lesquels elles se sont écoulées sont peu minéralisées, sulfatées calciques et chlorurées mixtes, magnésiennes, ferrugineuses (traces de fer) , radio-actives, chaudes. Les indications sont nombreuses : rhumatismes chroniques, goutte, traumatismes, troubles nerveux… D’ailleurs, le simple fait de se baigner et de profiter d’une eau à bonne température procure également d’énormes bienfaits à l’organisme. Pour en savoir plus, je vous invite à lire l’article : Les énormes bienfaits du bain chaud.
Les Anciens Thermes
La source Bains Doux est captée dans un bassin (non accessible) de 1 m² et de 1,5 m de profondeur, là où a été implanté en 1819 un établissement thermal, qui fut ensuite agrandit en 1854. Aujourd’hui, la source est acheminée par gravité dans un canal maçonné, qui passe sous la route, jusqu’au bassin aménagé gratuit. Son débit, variable tout au long de l’année, indique que celle-ci est mélangée à des eaux froides. Ces eaux deviennent ainsi plus chaudes et plus agréables (33-34 degrés mi-juin) en période d’étiage.
Aussi, une source chaude doit normalement maintenir une température et un débit constants, été comme hiver. À l’origine, la source Bains Doux devait être un simple écoulement d’eau chaude qui sortait de terre. Au fil des siècles, de simples travaux d’aménagements (creuser le rocher) ou l’implantation même de l’édifice (au XIXe s.) ont pu avoir une incidence sur le débit, la température, la qualité des eaux. Au XVIIIe siècle, ces eaux étaient déjà exploitées dans une baignoire collective.
Lorsque j’arrive aux Anciens Thermes, l’édifice actuel, je dois d’abord descendre une série de marches d’escalier. Plusieurs portes d’entrées, de formes cintrées et assez petites, sont placées le long de la façade. Elles invitaient autrefois les baigneurs à pénétrer dans de petites chambres pour y prendre un bain. On y trouve 2 baignoires par chambre (parfois 1), appliquées contre le mur, plus ou moins encaissées dans le sol et se touchant parfois par leurs extrémités.
Des canalisations portaient l’eau chaude jusqu’à chaque baignoire. Elles semblent être faits de plomb (ou peut être autre chose), métal largement utilisé au XIXe siècle pour la fabrication de canalisations d’eau (et de peintures). Même les Romains, avec leurs techniques ingénieuses, employaient déjà du plomb pour leur captage de leurs eaux destinées à la consommation (et des thermes). Pourtant, la toxicité du plomb était connue depuis l’Antiquité et reste toujours d’actualité. Dans une canalisation en plomb, l’eau se charge de ce métal. Sa charge augmente d’autant plus qu’elle est chaude, et qu’elle passe du temps au contact avec cet élément.
Ces baignoires, de dimensions réduites, devaient être vidangés entièrement avant d’être remplis à nouveau. L’étroitesse de la baignoire fait que l’utilisateur y reste presque immobile et en ressort plus fatigué qu’en y entrant à cause de la contrainte de la posture.
Les baigneurs n’avaient pour lumière que celle qu’ils recevaient par la porte d’entrée. La vapeur obscurcissait encore la chambre et ruisselait le long des murs.
La Fontaine des Amours
La Fontaine des Amours se trouve à la sortie de la ville en empruntant la route qui part vers Sougraigne. À un endroit précis, un sentier borde la route et part sur la droite. La Fontaine des Amours est rapidement atteignable à pied.
Ici, les eaux tourbillonnantes de la rivière, la Sals, se jettent dans une grande vasque qui a été creusée dans un terrain imperméable. Celle-ci recueille une grande quantité d’eau et est d’une bonne profondeur pour un barbotage rafraichissant ou pour effectuer quelques exercices de nages salutaires. Une petite vasque, en forme de coeur, recueille également ces eaux.
Au gré des sons de la nature et des insectes que l’on peut observer autour des espaces aquatiques, on se croirait presque dans un conte de fée.
On y trouve autour une végétation apaisante, apportant de l’ombre et un peu de fraîcheur.
J’ai trouvé le cadre vraiment séduisant au mois de juin avec un espace de baignade préservée des ardeurs du soleil. L’eau était à 19 degrés.
Enfin, je rappelle que cette surprenante rivière est salée. Sa source naît au sommet d’une petite vallée à 7 km au Sud-Est de Rennes-les-Bains. Elle possède alors jusqu’à 60 grammes de chlorure de sodium par litre, un taux énorme qui lui donne des propriétés intéressantes. Ce taux représente le double de celui de la mer Méditerranée.
Lors de son parcours de 20 km, la source de la Sals grossit avec les apports d’eau douce provenant des vallons voisins. Elle voit donc sa concentration en sels minéraux diminuer petit à petit. À la fontaine des Amours, la salinité de l’eau reste encore élevée avec une dizaine de grammes (voir plus) de chlorure de sodium par litre d’eau.
Les personnes qui viennent s’y baigner peuvent ainsi profiter d’une eau froide à forte minéralisation. Ces sels complexes ont une action générale tonique, et des actions locales accélérant les processus physiologiques. Le sodium est aussi l’un des principaux agents des échanges cellulaires au niveau atomique. Ces eaux peuvent ainsi aider à soigner les rhumatismes, les affections musculaires et articulaires, les douleurs nerveuses, etc. D’ailleurs, le chlorure de sodium est aussi presque toujours représenté dans une source chaude, ce qui est le cas de la source Bains Doux.
La source de la Madeleine
La source de la Madeleine se trouve à la sortie de la ville. Tout de suite après avoir traversé le pont (direction Sougraigne), il faut emprunter un sentier sur la droite qui mène aux sources en une vingtaine de minutes. De l’autre côté de la route, quasiment en face du départ de cette courte randonnée, il y a un parking et un chemin menant un peu plus loin au camping La Bernède.
Un gué empierré permet de traverser aisément sur la rive opposée de la Sals. Le sentier, souvent bordé par des fougères, est ensuite tout tracé jusqu’aux sources et longe cette fois-ci la Blanque, un torrent d’eau douce. Lorsque j’arrive à destination, une première source sulfureuse, aux abords du sentier, suinte d’un rocher.
Puis, une autre source, située à quelques mètres, suinte au pied d’un autre rocher qui attire un peu plus l’attention. Cette source, bien distincte, est ferrugineuse et coulait autrefois un peu plus joyeusement pour la plus grande satisfaction des villageois. Les suintements de fer colorent l’endroit et ajoutent du charme à l’endroit.
La source de la Madeleine était un lieu de promenade plaisant, au milieu des bois, comme en témoignent les quelques traces laissées. Des bancs en pierre permettent aux personnes de se poser. Des inscriptions datant du XIXe siècle, gravées sur le rocher, laissent quelques souvenirs impérissables.
Les gens des alentours l’utilisaient comme buvette car cette eau est bienfaisante. Maintenant, elle n’est guère abondante (mais coule toujours) et n’est plus entretenue.
La source du Cercle
L’accès à la source du Cercle se fait par un chemin balisé, près du hameau du même nom.
Son dépôt ferrugineux rougeâtre qui la trahit la distingue nettement des eaux banales et reste commun à la très grande majorité des sources thermominérales bienfaisantes.
Cette source naturelle était connue des habitants depuis des temps immémoriaux et figure parmi les fontaines minérales qui peuvent s’enorgueillir d’un passé gallo-romain.
Au XIXe siècle, à l’occasion de travaux d’aménagement de la source, les ouvriers mirent à jours des vestiges gallo-romains. Ce lieu était alors très fréquenté.
Aujourd’hui, la source n’est qu’un filet d’eau rougie retournant rapidement sous la terre. L’aménagement actuel, bien différent de celui du siècle dernier, continue tout juste d’alimenter la nostalgie d’une époque à jamais disparue.