2 SOURCES D’EAU CHAUDE À DÉCOUVRIR ABSOLUMENT, HAUTES-ALPES
- Par Nature Source Chaude
- Publié le
- Mis à jour le 9 novembre 2024
Nichées entre le parc naturel régional du Queyras et le parc national des écrins, 2 résurgences d’eau chaude auraient décidé de faire une vaporeuse apparition sur une plaine dominée par d’imposants massifs montagneux. Nous sommes au Plan de Phazy, un lieu magique bordant la Durance où sourdent deux sources thermales : la source des Suisses et la source de la Rotonde.
Cette dernière jaillit du sol et alimente 4 bassins d’eau chaude allant de 26 à 28 degrés. Il est même possible de s’y baigner librement toute l’année. Surplombée par un édifice appelée « la Rotonde », elle en porte même son nom. Découvrons ce site exceptionnel avant de s’intéresser à un autre site tout aussi exceptionnel à 2 km de là. En effet, il existe une troisième résurgence d’eau chaude présente sur la rive opposée de la Durance. Un autre lieu magique où se situe la fontaine pétrifiante de Réotier.
AU SOMMAIRE :
Carte des sources chaudes dans les Hautes-Alpes
La route nationale N94 se trouve à proximité du Plan de Phazy. En hiver, la petite route menant au parking est généralement rapidement déneigée. L’accès aux bains est gratuit toute l’année.
Sur la carte :
– les sources chaudes du Plan de Phazy
– la fontaine pétrifiante de Réotier
– les sources chaudes de Monétier-les-Bains
Avertissement :
La baignade à la source d’eau chaude du Plan de Phazy est normalement interdite. Un arrêté pris par le maire de Risoul en août 2020 a été apposé fin juin 2024 sur un piquet métallique posé derrière les bassins du haut. Retrouvez plus d’informations sur la carte.
Le Plan de Phazy : un passé mystérieux
Dès l’Antiquité, les sources d’eau chaude du Plan de Phazy étaient certainement connues par les romains, bien qu’il ne reste peu de traces de leur passage. Malgré tout, on peut y découvrir non loin de là, les souvenirs d’une voie romaine : la voie des Alpes. Celle-ci longe la Durance et remonte la vallée jusqu’à Briançon pour ensuite passer par le col du Montgenèvre pour rejoindre l’Italie. Lorsque les romains traversèrent la région et conquirent la Gaule, les sources chaudes du plan de Phazy représentaient de toute évidence une belle promesse de bien-être. D’autant plus qu’ils étaient de grands amateurs de bains thermaux dont ils avaient fait un véritable art de vivre. Existaient-ils des installations romaines à cette époque, ne serait-ce sommaire? Difficile de le savoir! L’histoire fut par la suite longtemps marquée par des pillages, des destructions et des abandons. Les bâtiments et les installations des thermes en faisaient partie. De nombreuses sources furent dévastées et des stations incendiés.
Au moyen âge, trois hôpitaux furent construits à quelques kilomètres du site du Plan de Phazy. Un de ses hôpitaux se situait à Saint-Clément, tandis que deux autres se situaient au pied et au sein du plateau de Mont-Dauphin. A quoi étaient destinés ces hôpitaux? À cette époque, longtemps les militaires furent hébergés dans des hôpitaux civils ou chez des particuliers. De plus, la grande réputation des eaux thermales pour les soins aux soldats blessés étaient connus. Qui plus est, le Plan de Phazy et ses alentours représentait un lieu stratégique situé au carrefour de trois vallées, dont la présence militaire était justifiée.
À la fin du XVIIe siècle, la place de Mont-Dauphin se fortifia (Vauban), renforçant ainsi la présence militaire et verrouillant les accès des vallées aux puissances étrangères. Plusieurs dizaines de milliers de militaires transitaient dans la vallée.
Les sources d’eau chaude du Plan de Phazy étaient déjà fréquentées par ses soldats et les garnisons toutes proches (Mont-Dauphin, Embrun…) qui représentaient l’essentiel des curistes avec les autochtones.
D’ailleurs, ce sont des militaires basés à Mont-Dauphin qui furent les premiers à étudier les propriétés de ces eaux. Ce n’est que plus tard (XIXe s.), avec l’apparition des premiers instruments que les scientifiques effectuèrent les premières analyses chimiques.
La Rotonde et sa source d'eau chaude
La période révolutionnaire et les guerres napoléoniennes (1803-1815) ont brutalement interrompu en France un certain engouement vers les projets thermaux (nouvelle construction, rénovation, aménagement). Lorsque celles-ci se terminèrent, une nouvelle page s’ouvrit. Nous sommes à l’aube des temps modernes. Le monde avançait à grand pas vers autre chose. Des projets thermaux ambitieux (Bourbonne, Vichy, Plombières…) au plus sommaire s’inscrivirent dans une nouvelle période de prospérité.
En 1824, sous le règne de Charles X et Louis XVIII, la création d’un bâtiment thermal minuscule autour du point de sortie de l’eau vît le jour. Cette station thermale s’appela « La Rotonde ».
On est loin de l’image d’un édifice à multiple fonctions regroupant logement et divertissement qui persista à l’époque (1800-1850) dans « les villes d’eaux ». Ici, les curistes habitaient déjà sur place. Ils furent majoritairement des locaux et des militaires stationnés dans les garnisons toutes proches (Mont-Dauphin, Briançon).
L’établissement de la Rotonde a été construit au pied du rocher de Barbein sur un bombement de tuf induré. Il a été bâti en amphithéâtre adossé à la source minérale. Tout autour, un escalier permettait d’accéder aux baignoires (6 ou 7) creusées dans la pierre.
Ce type de construction très sommaire permettait d’utiliser la source minérale au sortir de la roche limitant la perte des propriétés de l’eau et de ses principes actifs. L’emploi médical de la source minérale se faisait au plus simple : un bain à l’état brut.
En 1935, un séisme va toucher durement la Rotonde. La source va se tarir puis sera retrouvée quelques mètres plus loin en dehors de l’édifice. Sa destinée va lui permettre ainsi de s’unir à nouveau avec le soleil et féconder le sol, échappant à tout autre projet de station thermale jusque là. Pour en connaitre davantage sur ce sujet (le sol), je vous invite à lire cet article : Le sol, couche de base et milieu vivant d’une source chaude.
Présentation du site du Plan de Phazy
Rattaché à la commune de Guillestre et de Risoul, le site du Plan de Phazy est situé à 900 mètres d’altitude et abrite 2 résurgences d’eau chaude.
La première se situe à proximité de la petite route menant à la source de la Rotonde. En réalité, cette source présente peu d’intérêt. Les eaux tièdes (26 degrés) de cette émergence ne se prêtent pas à des bains, au contraire des eaux voisines (source de la Rotonde) qui atteignent 27-28 degrés. À cette température chaque degré compte.
Cette source appelée « source des Suisses » ou « source des Vignes » est captée et utilisée pour le chauffage des serres d’horticulture.
Malgré un débit conséquent (300 litres/min), les abords du captage ne laissent souvent (selon la végétation) que quelques traces de dépôts de fer dans un champ qui restent visibles de la petite route.
La deuxième résurgence d’eau chaude est la source de la Rotonde. Elle jaillit d’un rocher en marbre rose à 28°C (la température de l’eau du 1er bassin est de 27,4°C) à quelques mètres de l’édifice. Ainsi, c’est à cet endroit précis que l’eau de source a décidé de réapparaître (suite au séisme) mystérieusement à la lumière.
Par conséquent, un plancton thermal est observable sur le griffon. Celui-ci a l’apparence d’une mousse verte et se retrouve également dans les 4 bassins circulaires. Le débit de la source est de 70 litres/min.
L’eau qui s’écoule à travers les 4 bassins s’écoule ensuite sur un plateau de tuf ferrugineux (couleur orangée).
Les éléments chimiques dissous dans l’eau favorise une biodiversité exceptionnelle (faune et flore spécifique des prés salés). D’ailleurs, le site du Plan de Phazy est classé Natura 2000. Cet espace sensible protégé abrite le seul pré salé de la région PACA.
Source de la Rotonde : nature de l'eau et vertus thérapeutiques
Il existe une typologie chimique usuelle pour classer les eaux thermales. Celle-ci fait partie des eaux chlorurées sodiques. Cette appellation vient du fait que les anions (ion négatif) majoritaires retrouvés dans cette eau sont représentés par les ions chlorures. Tandis que que les cations (ion positif) majoritaires sont représentés par le sodium. D’autres éléments majeurs sont également présents en quantité notable. On y trouve des sulfates, du calcium, des bicarbonates, du magnésium. Tout ces éléments proviennent du lessivage de différentes roches par ces eaux souterraines qui y circulent.
Seul un élément mineur ou élément-trace est représenté sur le tableau. Il s’agit du fer avec une concentration de 0,6 mg/L. D’autres éléments-traces ont été relevés grâce aux travaux du géologue POULAIN (1977) et plus tard par M.GRIMAUD (1987). Ces éléments-traces appelés aussi oligo-éléments sont essentiels au bon fonctionnement de l’organisme. On y trouve aussi du fluor, de la silice, du lithium, du zinc, du césium…sous une forme parfaitement assimilable.
Le docteur LESBROS signalait aussi dans sa thèse en 1947 une radioactivité due à l’émanation de radon, ce qui est courant dans une source d’eau chaude. Cette radioactivité naturelle et stimulante était déjà mise en avant dès les années 1930 par de grandes stations thermales à coup d’affiche publicitaire. D’autres gaz viennent parfois s’y ajouter comme le gaz carbonique, l’azote, l’hydrogène sulfuré…
Les vertus thérapeutiques de cette source chaude ont été étayées par diverses études.
Dès 1784, le chirurgien-Major CHARMEUIL de l’hôpital militaire de Mont-Dauphin publie ses travaux dans le Journal de Médecine et Chirurgie militaire. D’après lui, ces eaux magiques guérissent toutes les affections.
En 1947, le docteur LESBROS ne fait que confirmer ses vertus thérapeutiques. Elles sont réputées pour leurs actions sur les affections respiratoires, rénales, hépatiques, les dermatoses, les rhumatismes, les maladies articulaires…
La fontaine pétrifiante de Réotier et sa source d'eau chaude
Nous sommes cette fois-ci sur la rive opposée de la Durance à 2 km du Plan de Phazy. De là, après avoir cheminé une dizaine de minutes d’un parking se dresse une fontaine pétrifiante connue depuis l’Antiquité.
Cette fontaine est une véritable oeuvre d’art dessinant une imposante gueule de monstre.
D’ailleurs, on sait qu’elle attirait déjà de nombreux visiteurs à cette époque.
En 1889, lors de la construction d’une ligne de chemin de fer, la découverte de plusieurs centaines de pièces romaines, à sa base, en laisse un témoignage.
Son emplacement était également situé sur la voie romaine Arles-Rome. Alors comment une telle chose a t’elle bien pu se former?
De manière générale, la formation de concrétions calcaires pétrifiant le milieu environnant s’explique de la façon suivante. D’une part, la présence de certains éléments majeurs dissous dans l’eau thermale est nécessaire. Ces éléments que sont le calcium, le magnésium et les bicarbonates doivent être sous forme ionique. D’autre part, ces éléments sont censés précipiter lorsque certains gaz dissous dans l’eau (notamment le gaz carbonique) s’y libèrent.
Mais d’après la recherche scientifique, la formation de ces minéraux serait probablement plus complexe qu’une simple réaction chimique. Ces concrétions calcaires pourrait aussi être l’oeuvre de micro-organismes.
Pour finir, cette eau de source a une teneur en minéraux plus faible que celle de la Rotonde (5g/l contre 7g/l) et une température de 20°C. Cette eau posséderait de nombreuses vertus thérapeutiques. D’ailleurs, un laboratoire connu sous le nom de « L’OCCITANE » utilise cette eau pour la formulation de certains de ses produits.